Pink Floyd - Atom Heart Mother
Sortie 1970
En tout premier lieu, je tiens à assurer que le choix de cet album ne relève ni du snobisme, ni de la mauvaise foi (ou alors si peu !). Certes, Atom Heart Mother est sans doute un album imbuvable pour beaucoup, même parmi les fans du Floyd. Et compte tenu qu’il s’avère déjà très difficile aujourd’hui de faire rêver avec Pink Floyd, cette machine prog-rock devenue monstrueuse et au succès quasiment rédhibitoire, la tâche à laquelle je m’attelle relève presque de la folie suicidaire. Mais bon, pourfendons les idées reçues et balayons rapidement les luttes intestines entre la secte Gilmour, l’Eglise Watersienne, voire les (ana)Barettistes de la première heure. Atom Heart Mother est tout simplement un album de génie. Inutile d’y chercher un tube, un quelconque classique ou même un message subliminal : Atom Heart Mother est un album avec une vache dessus (quelle classe cette pochette), qui s’ouvre sur un morceau fleuve qui ne ressemble à rien et se termine par la bande son de 13 minutes du petit déjeuner d’un mec nommé Alan. Comment ça, ça ne vous motive pas ? Pourtant, je mettrais ma main au feu que quiconque prend le temps de s’allonger et de s’envoyer les 23 minutes du titre éponyme "Atom Heart Mother" sentirait insidieusement en lui que cet album est culte. 23 minutes d’expérimentations sonores mêlées à un orchestre symphonique, envolées épiques cédant la place à un groove endiablé, chorale digne d’un Carmina Burana contemporain… Ca déroute, mais à chaque écoute c’est meilleur. Les heureux possesseurs du vinyle retourneront ensuite la galette pour découvrir, prenant en contrepied la première face, les ballades paisibles et gentiment désabusées "If" (signée Waters pour les intégristes) et "Fat Old Sun" (de Gilmour pour les fanatiques), avec au milieu, l’excellent "Summer ’68" (tiens, composée par Wright), certes un peu gâchée par le final au synthé aussi pourri que grandiloquent. D’accord, "Alan’s Psychedelic Breakfast", qui clôt l’album s’apparente plus à un foutage de gueule, même si les esprits les plus détraqués y percevront du génie. Mais bon, reste cette impression de cohérence dans l’anarchie totale des titres (format des chansons, thèmes, instrumentations…), de foutoir savamment calculé, calibré au millimètre, que je ne m’explique toujours pas. Peut-être grâce à cette vache, qui n’a rien à voir non plus, et qui place cet album sous le signe du non-sens le plus absolu. Atom Heart Mother est un OVNI, bien loin de la mégalomanie du futur Dark Side of the Moon, et dépourvu des titres immédiats d’un Meddle ou Wish you were here. Et pourtant, l’essayer, c’est l’adopter.